Mois : mai 2024

Clap de fin de notre fabuleuse traversée turque

« Une brise légère » nous indique la météo. Clairement, ceux qui tiennent le site « Meteoblue » ne sont pas cyclistes… On bataille contre un vent de folie (rafales de plus de 50km/h), notre Antoine peste contre les montées et le vent, il lutte comme il faut et on arrive à s’élever dans ces sacrés Monts Taurus !

Majestueuses ces montagnes ! Elles nous permettent de faire de magnifiques bivouacs sauvages et nos traditionnels feux de camp à l’abri des regards. C’est évidemment exigeant de s’élever à plus de 1200 m d’altitude, de redescendre puis de remonter à la même altitude. On se croit dans les montagnes russes d’une fête foraine, mais cela à l’avantage (toujours voir le positif !) d’alterner entre montagnes et côtes, entre nature et histoire.

Grosse descente et visite d’une ville romaine de plus de 2000 ans à Sidé avec baignade et glaces à la clef puis grosse montée et visite de l’amphithéâtre romain le mieux conservé au monde.

Notre route vers Antalya se fait par un accueil chez Özkel dans un petit village de montagne, lors d’une journée de grosse pluie. Elle travaille avec son mari pour ouvrir un restaurant en juin. Elle prend tout de même le temps de nous amener chez elle, de nous mettre au sec, de nous laisser les clefs de la maison, nous montrer la machine à laver et la cuisine et elle repart. La gentillesse des Turcs est vraiment incroyable. On passera du temps avec ses deux grandes filles, une d’entre elles offrira deux poupées Barbie à Agathe, qui se découvre une passion pour ces poupées. 

Nous descendons de ces Monts Taurus (1100m de descente en 10 kms) et découvrons des orangeraies, champs de grenadiers et serres de tomates/aubergine/bananiers/fraisiers sur des dizaines de kilomètres à la ronde. On achète nos fruits directement au producteur (quand ils ne nous arrêtent pas pour nous les offrir – j’avoue avoir un peu pesté lors d’une montée lorsque j’ai roulé avec les 4kgs de concombres offerts avant une pente à 30% mais promis, on les a tous mangés !). On dort dans des orangeraies, fruits frais pressés par nos soins le matin. Merci Ali de nous avoir permis de faire le plein de vitamines dès le matin !

Notre arrivée à Antalya chez Serkan (merci une nouvelle fois au réseau warmshowers d’exister) se fait donc de la meilleure des façons. Nous resterons avec Elif et Serkan une journée, plage et visite de la ville au  programme. Et surtout de bons fous rire : Serkan est très drôle et heureux d’être avec les enfants ; ils avaient même prévu pour eux dessins et feutres, frites, chocolat, dessins animés en français …

Allez, il faut repartir et deux choix s’offrent à nous : longer la côte sur une 2×2 voies avec tunnels ou faire 2700m en 110 kms. Et bien, on travaille pour enlever la cellulite et raffermir nos corps et on transpire : vous devinerez donc notre choix. Et une journée avec un minimum de 8 kilomètres avec 700 mètres de dénivelé ; on touche nos limites et le trek aussi. La roue arrière a été changée au Mexique et la nouvelle roue ne supporte pas les gros pourcentage des routes de montagne turque. Julien a changé 7 rayons en 2 mois. On a du mal à trouver une roue plus costaud (c’est le problème du standard 28 pouces, pour ceux à qui ça parle) et on a bien sûr aucune envie de renoncer à la montagne. Solution : il va falloir refaire le plein de rayons.

On redescend une dernière fois sur la côte. Cela ressemble à la Corse. On rencontre Mathis, cyclo français rentrant en France depuis l’Inde. On roule ensemble (au vu des coef des pentes, merci à toi d’avoir papoté avec Agathe qui marchait à côté de toi pour m’alléger puis d’avoir attendu Antoine qui mettait toutes ses forces dans les pédales pour essayer de suivre la conversation !), puis feu de camp en se racontant nos récits de voyage. Les enfants sont ravis de ces moments et nous aussi. Nous avons ensuite trouvé de magnifiques spots pour dormir en bord de mer et se baigner – belle récompense pour Antoine après la grimpette des derniers jours.

Notre route en Turquie s’achève à Kaş, sous nos yeux émerveillés devant la beauté de cette baie. Nous nous arrêtons dans un camping avec une vue et une mer turquoise vraiment magnifiques. Par contre, petit point à améliorer pour les prochains voyageurs, la température de l’eau laisse à désirer.


Le 9 mai au soir, après plus de deux mois en Turquie, les yeux tournés vers la mer, les yeux sont embués. Quel peuple rempli de gentillesse et de chaleur humaine, que de paysages divers et somptueux. Quel bonheur d’avoir roulé sur les petites routes et chemins du Sufy Trail (merci Ingrid et Serkan). Quel bonheur d’avoir pu faire autant de bivouacs somptueux.

La route doit continuer mais nous quittons à regret ce pays pour lequel nous avons eu un véritable coup de cœur (si on fait l’impasse sur son président évidemment). Merci à vous, amis turcs, pour votre accueil, vos messages Whatsapp quotidiens d’accompagnement, vos attentions, vos sourires, vos klaxons (vous êtes des fous du volant), on ne sera jamais à votre hauteur pour l’accueil mais nous en prendrons de la graine, soyez en sûrs. On emmène un bout de vous pour la suite de notre chemin, on ne vous oubliera pas, merci, du fond du cœur.

Cap sur la Grèce. 

Güle Güle. 

Le coin des anecdotes

Il nous reste 5 kms à parcourir. Tout le monde a besoin d’une pause ; on s’arrête pique-niquer. Julien ne fait que regarder la montagne devant nous et son GPS. 20 minutes plus tard, il nous dit : « ça me dit bien de passer par là, ça fait un détour de 18kms et 800m de dénivelé, cela nous prend un jour de plus mais si on fait les fonds de sacoche, on a assez de nourriture ». Antoine a la bouche grande ouverte, prêt à gober une mouche : » Papa, c’est une blague ? ». « Bah non, ça va a être chouette », lui répond t’il. J’observe la scène amusée, on en a tous plein les jambes sauf Julien, qui clairement est au-dessus du lot physiquement. Il se rangera finalement au reste de la famille et on fera les 5 kms sur du plat. Il finira sa journée par 300 pompes et sans avoir vu sa montagne. Et moi je rigole encore toute seule en revoyant le visage d’Antoine…

Quand la magie du camping opère… On a toujours eu des supers voisins (dédicace à Nico et Corinne) et c’est aussi le cas en camping. A Kaş, nous sympathisons donc avec nos voisins : Eigine, un médecin turc en caravane et Ralph, un pré retraité allemand, en voyage moto itinérant au long cours. A 18h, Eigine nous dit : « venez tous à table, j’ai fait à manger pour tout le monde. » On est le 8 mai et on ne peut s’empêcher de se dire en trinquant à l’apéro : »la guerre, quelle sombre idiotie ». Ralph renonce à voyager en Iran à cause des tensions avec Israël (soutenue par l’Allemagne et la France) et nous, avons renoncé à traverser la Russie (nous voulions rejoindre la Mongolie via l’Europe du Nord et la Russie lors de notre projet initial). Deux pays et deux peuples que nos enfants découvrirons sûrement quand la folie de la guerre sera passée. Bref !

On passe une excellente soirée, tout le monde se régale et l’on perfectionne notre culture culinaire turque. Le lendemain, Eigine appelle Antoine : « viens, on va faire des hamburgers ». Les filles, elles, ont adopté la caravane. Et là, sous nos yeux ahuris, il commence à vider sa caravane et à nous donner au moins 4kgs de nourriture, casquette, bouilloire, lunettes de soleil, lampes extérieures, couteau et on en passe… Antoine pousse des : »waouh, non mais c’est diiiiiingue, non mais, non mais, non mais,… », s’extasiant devant tous ces objets (on pensait l’habituer à vivre avec l’essentiel, ce n’est pas tout à fait gagné !). On remercie chaleureusement Eigine et évidemment on lui dit : « c’est adorable mais nous sommes à vélo et tu sais, on a besoin de rien. Nous avons déjà fait un colis pour la France de 5 kg de cadeaux reçus durant ces deux mois en Turquie la semaine dernière car nous étions trop lourds ». La sentence tombe : « Si vous refusez, je vais être très vexé ». « OK, on ne va pas se fâcher mais tout ne rentre pas dans les sacoches, Eigine, peut-être que la casquette suffit ? ». Rien à faire ; aucune négociation possible… Il vérifie que nous prenons tout et c’est très très lourd. Mais c’est avec le sourire d’avoir croisé sa route que nous prenons le chemin pour le ferry nous amenant à Katellorizo, petite île grecque. Nous avons donc toujours ta bouilloire avec nous, sois en rassuré !

L’aventurière en herbe

Bonjour à tous,

Je viens de fêter mes 15 mois et je me suis dit que vous seriez peut-être content d’avoir de mes nouvelles ! Je vais continuer à tout vous raconter :

Niveau vestimentaire : depuis que j’ai quitté le Mexique, je dois être habillée. Aimant vivre en couche, je le fais savoir à mes parents en hurlant dès qu’ils me mettent un pantalon, une polaire ou des chaussettes. Comme ça, ils vont se débrouiller pour me retrouver du soleil au lieu de la neige ! Et dès que je peux, je suis toute nue et surtout sans chaussures.

Niveau couches : les couches lavables battaient leur plein en Amérique Centrale, cela séchait en un tour de main. Et bien, depuis notre arrivée en Turquie, elles sont au fond de ma sacoche. Couches jetables à 100% et lingettes 100% non écolo… la famille n’en est pas très fière mais difficile de faire autrement avec la météo. 

Niveau transport vélo : je suis dans ma remorque pour les siestes (que nous avons changée pour la marque Thule et qui me convient beaucoup mieux). Je me permet d’hurler pendant 2 minutes à chaque fois que mes parents me mettent dedans pour la sieste, ça fait toujours son petit effet quand nos hôtes me voient pleurer : « oooh la pauvre ». Et je m’endors 50 mètres plus loin… Quand je me réveille, j’ai toujours une petite minute où j’observe mon environnement, aucun repère hormis les 4 êtres humains m’entourant au quotidien.

Et puis lorsque je suis réveillée et que l’on doit encore rouler, je suis sur le siège avant avec Papa. Je fais coucou à tout le monde, comme la reine d’Angleterre. Succès garanti : les gens s’arrêtent et m’offrent des sucettes. Je leur envoie un petit bisou et hop on repart ! Mon frère et ma sœur sont dégoûtés car parfois je suis la seule à recevoir des petites sucreries.

Niveau alimentaire : Maman continue à m’allaiter pour contrebalancer les petits écarts. Œufs durs, fromage, fruits et légumes rythment mes pique-niques. Le soir, je raffole du boulgour ou des célèbres pâtes au fromage cuisinées au réchaud. Mes parents font attention mais quand on est invité, on m’emmène souvent à l’abri de leurs regards et là… : glace, baklavas, bonbons, thé sucré à profusion, un vrai régal !

Niveau jouets : un livre et des marionnettes de main offerts par Mamie, nos Tupperware et bols, une petite voiture et surtout tout ce que la nature m’offre : bâtons, pierres, feuilles,… Je joue souvent dans ma remorque quand nous sommes arrêtés, je ne sais pas ce que c’est d’avoir une chambre. A mon retour, j’espère que mes parents auront la présence d’esprit de mettre la remorque dans ma chambre !

Niveau motricité : à 1 an, je fais mes premiers pas. Pas évident avec un terrain qui n’est jamais plat, entre cailloux, pente, trous dans l’herbe,…et oui c’est cela de ne pas habiter en maison. Mais je m’accroche et à Istanbul, j’ai fais de sérieux progrès en quelques jours. Maintenant je gambade dès que je descends de ma remorque. Je me prends des belles gamelles mais pas de pleurs. Je n’en ai pas le temps si je veux essayer de suivre les déplacements d’Antoine et Agathe !

Niveau éducation : Papa m’apprend plein de choses sur la faune et la flore quand je suis sur le siège vélo devant lui, et le reste du temps aussi d’ailleurs ! Maman me monte des petits ateliers Montessori au campement (c’est la mode m’a elle dit…) et mon frère et ma sœur me font faire plein de bêtises (par exemple, ils me mettent dans l’eau de la fontaine au bivouac et je reviens vers la tente complètement trempée, mon frère joue à me faire peur,…)

Niveau câlins : cela bat son plein ! Ce que j’adore : le matin, dans la tente, je réveille tout le monde à tour de rôle et je leur fais un petit câlin.  Et puis j’ai des câlins du monde entier ! Peu importe le pays visité, je passe dans les bras de toutes les personnes que je rencontre ! Même un policier qui était dans un salon de coiffure à Konya a demandé au coiffeur d’arrêter sa coupe ; j’étais dans la rue et il a appelé Papa pour que je puisse prendre une photo avec lui ! Incroyable !

Au Mexique et en Turquie, des gens que nous n’avions jamais vus et à qui nous n’avions jamais parlé me prennent dans leurs bras sans demander la permission à mes parents. Au début, cela fait bizarre mais finalement on s’est tous habitué et cela nous fait sourire et même chaud au cœur de recevoir autant de chaleur humaine. 

Niveau sommeil : pas de souci pour mes siestes, je suis bercée au rythme des coups de pédales. Je m’améliore : si Papa arrête de pédaler, je continue ma sieste. Avant il devait tout le temps pédaler, même pendant la pause courses. « Mon père, il est tellement fort  » comme dirait Aldebert, mais j’essaie de le préserver un peu tout de même. La nuit, je vis au rythme des bruits des duvets, des fermetures éclairs de la tente mais je suis contente d’être entourée ! Je me réveille quand même parfois (ou plutôt toutes les nuits) histoire de pimenter un peu le quotidien ! Mais je ne réveille que Maman, c’est plutôt fairplay pour mon frangin et ma frangine, non ?

Niveau matériel de puériculture : ma chaise haute, ce sont les genoux de mes parents. Mon lit bébé, un matelas Thermarest et ma poussette : ma remorque vélo. 

Niveau douche : tous les 3 jours environ. Si l’eau est vraiment trop froide, en bivouac, maman fait tout doucement avec des cotons lavables. Papa, lui me lave à grande eau. Et là… j’hurle ! Non mais !

Niveau vaccin : je suis à jour ! Merci aux copains venus nous voir en voyage qui nous ont amené les vaccins n’existant pas au Mexique (dans un thermos isotherme permettant de transporter des seringues devant rester au froid). Les autres vaccins, je les ai fait au Mexique. Pas de lotion anti-douleur, pas de pansement : tu arrives, tu es déjà en body, THE piqûre et 2 minutes après tu ressors ! Pas de prise de tête avec le pansement anesthésiant à mettre une heure avant !

Bref, je suis une petite fille heureuse ! On verra à mon retour comment je pourrais faire des siestes sans être bercée sur les routes du monde. Mes parents se demandent aussi ma réaction lorsqu’il sera temps de prendre le chemin de la crèche ou de la nounou ! Moi, je profite de chaque moment avec eux 4. Chaque chose en son temps !

Allez, bon vent à tous (de dos de préférence !)

Anna (ou Kikou passe partout).